La volonté et le hasard

Mosaïque

samedi 30 mars 2013 , par Joël Auxenfans

Si l’on peut s’étonner de ce que les Athéniens inventeurs de la démocratie au Vème siècle av JC, tiraient au sort leurs représentants au lieu de les élire, on peut aussi remarquer que des sculpteurs aussi maîtres de leur art comme Polyclète laissaient fatalement les veines du marbre de leurs statues apparaître "où bon leur semblait".

D’où les "Trois stoppages étalons" de Marcel Duchamp, voici tout juste un siècle en 1913, apparaissent comme une magistrale démonstration du rôle du hasard dans la création. Il suffit en outre de penser à la génétique déterminant chacun de nous pour s’en aviser.

Donc en art comme en politique, la volonté (dessiner, désigner, choisir, élire, coopter, vouloir) et le hasard se partagent le domaine de l’action, et donc celui des résultats. Il était intéressant de proposer aux élèves de se poser à leur tour cette question, en accueillant avec précision dans leur travail (en le voulant à un endroit précis) l’action du hasard, peut-être comme une façon de moins considérer l’art comme relevant du domaine de l’absolue maîtrise, mais aussi comme celui de l’aventure et de l’accueil des circonstances et de l’insu.

Certains ont opté pour les forces physiques (je laisse tomber) mais qui court toujours le risque d’être un peu contrôlé tout de même par la volonté. D’autres ont demandé à d’autres personnes de déterminer tel ou tel paramètre de leur travail (couleur, nombre, mot, geste...), d’autre ont utilisé des chiffres, des dés, les pages d’un dictionnaire ouvert au hasard sur un mot...Chaque fois en décrivant le protocole suivi, protocole parfois complexe, parfois simple.
Le fait est que les travaux sont multiples, parfois aboutis visuellement, souvent avec humour, parfois très méthodiques. Le but ultime était de faire prendre conscience du rôle joué dans l’art et dans la vie par le hasard, et comment celui-ci pouvait enrichir les constituants de la seule volonté en faisant sortir la personne du cadre de ses goûts, habitudes et conditionnements culturels.

Ce travail se poursuivra par une projection du film "12 hommes en colère" de Sidney Lumet (1954), qui déroule les débats de douze jurés tirés au sort pour juger de l’envoi à la chaise électrique ou l’acquittement d’une jeune homme de 18 ans accusé de meurtre. Un travail visuel en technique de lavis,en noir et blanc, suivra.

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