Nous avons rencontré Paul Schaffer lors de notre visite au Mémorial de la Shoah. C’est un ancien déporté juif. Il a fui l’Autriche après son annexion par Hitler et est passé illégalement en Belgique où il est resté un an, avant de fuir vers Paris puis le sud de la France. Il y restera de mai 1940 à juin 1942.
A 17 ans, en août 1942, il est livré aux Allemands avec sa famille et 6500 autres juifs. Malgré une tentative d’évasion, il est rattrapé et emmené avec les autres au camp de Noé. Son père, gravement malade, restera à Noé où il mourra. Il est transféré à Drancy avec sa mère et sa soeur, puis ensuite en Pologne. Lors du tri, il réussit à s’arracher à sa mère pour aller avec les hommes qui iront travailler, alors qu’il n’avait pas l’âge requis. C’est un des moments les plus durs de sa déportation. Il va à Tarnovitz, puis à Schoppinitz, pour arriver en novembre 1943 à Birkenau. En arrivant, il apprend par un autre déporté l’existence des chambres à gaz et également le sort de sa mère et de sa soeur, gazées. A leur arrivée, il raconte que les déportés sont déshabillés, entièrement rasés, prennent une douche glacée et sont tatoués. Il raconte que si on ne disait pas bien son numéro tatoué en allemand, on était battu. Les déportés avaient perdu leur identité. Ce numéro était leur seule désignation.
Il réussit à se faire passer pour un métallurgiste et à aller travailler dans l’usine Siemens du camp où les déportés sont sont un peu mieux traités. Il a vécu l’évacuation du camp par les Allemands et les "Marches de la Mort". Après cela, il est emmené dans un wagon découvert vers une autre destination. Il décide de sauter du train avec un ami. C’est ce qui lui a sauvé la vie. Durant deux jours, ils boivent de la neige et mangent un morceau de pain, avant d’être recuillis par une dame qui leur donnera à manger. Ils seront définitivement sauvés quelques jours plus tard en rencontrant une patrouille soviétique. Il rentre en France et débarque à Marseille le 1er mai 1945.
Ce témoignage nous a permis de connaître les sentiments et les épreuves traversés par ce monsieur, qui a accepté de retracer cette période si douloureuse de sa vie pour nous la transmettre. Cette rencontre est précieuse car on se rend compte de ce que des êtres humains ont fait subir à des gens qui n’étaient pas inférieurs à eux ni supérieurs, seulement comme eux, et qui auraient du être traités en conséquence. Et que ces être humains qui se prétendaient évolués et supérieurs, ont agi de façon primitive et animale.