Entre Pixels et mosaïque, hommage aux vers de terre.
Notre terre, ses paysages, sa biodiversité et son climat ainsi que notre santé sont menacé.e.s par notre manière de nous alimenter majoritairement auprès de la production agro-chimique et mécanique industrielle qui prévaut à 90 % dans l’alimentation moyenne de la population. Comment croire peindre un tableau de paysage comme du temps des impressionnistes il y a plus de cent cinquante ans, alors que le travail agricole s’effectuait à la main et à l’aide de la traction animale uniquement, sans machines, ni engrais, ni pesticides (sans idéaliser ces temps difficiles).
Ce sont les vers de terre qui produisent le sol naturel et cultivable. On le fait comprendre brièvement aux élèves qui ne s’y attendaient pas ici : https://www.youtube.com/watch?v=qSBPHQ_dKsQ .
Puis, comme le démontre le grand scientifique spécialiste de la micro biologie des sols Claude Bourguignon, nous détruisons les sols, la vie, notre santé avec cette agriculture qui ne respecte pas les lois du vivant (voir ici sa très intéressante conférence visionnée par les élèves en classe)
Aussi nous faut-reconsidérer à la base notre regard sur les priorités et penser depuis le sol, le rôle faramineux du vers de terre, expliqué par Claude Bourguignon. Ces Lombrics sont les seuls animaux capables de restaurer un sol dégradé et de sans cesse l’enrichir, à condition d’être nourris. Alors le travail en arts plastiques va consister en deux actions complémentaires :
a) apporter en classe des sachets d’épluchures de légumes, fruits, coquilles d’oeufs, (pas de viande, fromage, poissons ni agrumes) qui seront donnés aux vers de terre grâce au bac de compostage installé par le département au centre de la cour dans le jardin du club jardin. Grâce aux élèves, on a obtenu ainsi plus de dix kilogrammes de matière organique à transformer par les vers de terre en mode aérobie, c’est-à-dire à l’air libre en oxygène, ce qui fait que ce compostage ne sent rien, et s’effectue tranquillement avec des matières indispensables à la vie du sol, qui sont transformées en compost fertile pour les arbres fruitiers du collège, au lieu d’être transportées inutilement et à grand renfort de pétrole par des camions bennes des ordures ménagères vers des incinérateurs eux aussi consommateurs de pétrole et facteurs de réchauffement climatique et de micro cendres toxiques.
b) dessiner, peindre un hommage multiple aux vers de terre, en se basant sur les pixels de nos écrans ou sur les tesselles de mosaïque des premières peintures gréco-romaines sur le sol des grandes fermes romaines, ces « villae » ayant marqué nos paysages. Ainsi les élèves doivent penser vers de terre mais avec une trame de petits ou gros carrés, qui soit suivent la forme comme en mosaïque, sont quadrille l’espace de la feuille de manière orthogonale. Ce qui est encouragé, c’est le choix intuitif et sensible de chaque élève à respecter plus ou moins cette consigne, de composer avec, pour trouver des solutions visuelles qui lui conviennent. Cela donne de belle recherches, diversifiées, riches de trouvailles, de liberté, de désobéissances pertinentes. Reprendre pied avec le sol, la vie du sol, les vers de terre, c’est peut-être redonner à l’humain une dimension plus modeste au sein du vivant, puisqu’il n’est après tout qu’une petite motte de terre fugitivement active avant de retourner à la terre, et dans laquelle sont entrées, au gré des processus vivants, de la pensée et de la lumière.